Les lecteurs qui ont apprécié « Mécanique du chaos » de Daniel Rondeau ont aimé l’aspect géopolitique souligné la complexité qui baigne le roman, avec ses multiples personnages et situations, lieux et temps.
L’auteur, journaliste au Monde et à Libé, devenu ambassadeur de France à Malte, puis délégué permanent à l’UNESCO de 2011 à 2013, fait des portraits au vitriol du milieu diplomatique, journalistique, ou policier. Il décrit et critique un milieu qu’il connait bien
Après une mise en place des personnages, les rouages apparaissent, avec leurs liens (banlieue parisienne, Lybie, Turquie, Malte, trafics de drogue, d’armes, d’êtres humains, d’œuvre d’art, terrorisme). Le roman s’inscrit dans une actualité que l’on reconnait, car on l’entend aux informations, mais dont on ne se doute pas de la complexité. Il fait comprendre que toutes les sociétés sont liées entre elle, avec une plaque tournante qui serait à Malte, Malte qui a toujours été un point clé de la Méditerrannée, et où se retrouvent tous ces trafics.
Daniel Rondeau s’appuie sur des faits réels, qu’il associe à des personnages de roman. Il décrit notre société post moderne, ou « société liquide » (voir les Chroniques de la société liquide » de Umberto Ecco), caractérisé par la diversité des populations, la précarité des statuts sociaux d’une partie de la population, la mouvance des unions conjugales, la mobilité sociale et la mobilité géographique. La ville Taurbeil la Grande Tarte n’est autre que Les Tarterêts, quartier d'habitat social de Corbeil-Essonnes, devenu emblématique de la question des banlieues en France.
Mais il en a dérouté ou déçu plus d’un
Tout d’abord la complexité lors de la mise en place des personnages. Pléthore de personnages, décrits dans des très petits chapitres qui ne permettent pas de les mémoriser, associé à une multiplicité de lieux et d’époques, qui perd le lecteur, et le fait se désinteresser de l’histoire
Quelques personnages ont été trouvé peu crédibles (l’étudiante en révolte qui fait des ménages pour payer ses études, devient prostituée de luxe, puis par amour adhère à Daesh et se fait sauter avec une ceinture d’explosifs, ou bien Harry, l’immigré agent informateur du caïd de la ville, qui se cache dans un trou pour lire les grands classiques)
Beaucoup n’ont pas vu une histoire mais des histoires, et un récit formaté, comme dans les séries à la télévision, avec un « happy end » peu crédible.
Une frustration sur l’aspect géopolitique, qui décrit mais n’explique pas, ne donne pas les clés pour comprendre.
Certains se sont interrogés sur le sens à donner à ce roman, ou l’ont lu avec un sentiment d’impuissance et de fatalisme. Ceci est lié au fait qu’il n’y a que des descriptions, pas d’explication. Ce qui est décrit est totalement chaotique, comme certains personnages (Moussa, M’Bilal), et le livre donne le résultat, mais n’avance aucun élément pour savoir d’où vient le chaos
Un lecteur a vu un livre à la gloire de l’occident et un plaidoyer à charge contre les arabes, en particulier avec la vision de la banlieue. Il l’attribue à l’émotion après les attentats de 2015-2016
Une lectrice y a vu un roman d’actualité mais une thèse sur la prégnance de l’islamisme, puisqu’il date le début de Daesh aux massacres de Sétif, en 1945, et avec une vision orientée de ces massacres, qui seraient principalement un massacre des Français par les Algériens, et le début du Jihad, en oubliant que le massacre des Algériens par les Français avait été encore plus sanglant, et que la revendication était nationaliste, et non religieuse
Enfin le style a été apprécié de différentes manières. Certains l’ont aimé alors que d’autres ont trouvé qu’il écrivait « comme un journaliste »
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