Si ce livre n’a laissé personne indifférent, il n’a pas non plus été unanimement apprécié sans réserve...
Certains ont trouvé intéressantes ces familles « ordinaires » de deux sœurs vivant au Havre dans les années 40, au moment de l’invasion allemande. Chaque famille a deux enfants, un garçon et une fille. L’auteure a choisi de raconter l’histoire par la voix des différents personnages, adultes (sauf le mari de Muguette, absent) comme enfants, plus ou moins à tour de rôle. Quelques-uns ont trouvé cette construction intéressante, émouvante, et aimé le style, qualifié de « très visuel », comme par exemple le naufrage. D’autres l’ont ressentie comme plutôt lourde, voire laborieuse, un peu comme une « composition française » de collège (l’auteure s’attachant à aborder une liste de sujets liés au thème traité avec le souci de n’en oublier aucun...) ou même avec un style qualifié de « classe ouvrière ». Pour une lectrice, il s’agit d’un reportage plus que d’un roman, avec des sujets juxtaposés. « C’est comme si l’auteure était piégée par ses recherches documentaires, on ne sent pas sa personnalité », a ajouté un lecteur.
Tous ont été intéressés par le lieu et l’époque (même si deux personnes ont déclaré en avoir un peu assez des livres sur la guerre de 40... et de 14 !). Le Havre n’a pas été choisi au hasard par l’auteure, cette ville a beaucoup souffert pendant la guerre – de la longue occupation allemande bien sûr - mais aussi des violents bombardements anglais en 44, qui ont quasiment achevé de la détruire totalement et au cours desquels de nombreux habitants ont été tués.
Le récit de l’exode au début a rappelé à certains des souvenirs vécus dans l’enfance ou de récits entendus, notamment de leurs parents. Le livre est visiblement bien documenté, donc on apprend – ce que nous ignorions tous - que des enfants avaient été envoyés en Algérie pendant la guerre, pour les protéger des violences et afin qu’ils soient mieux nourris.
Les personnages, quant à eux, ont été diversement appréciés. D’aucuns ont été émus par Joffre, sa modestie, sa sincérité et son courage ; il est résistant mais le cache, y compris à sa femme, afin de ne pas mettre sa famille en danger. Il cache aussi un enfant juif dans sa cave. D’autres l’ont trouvé peu crédible psychologiquement, et se sont interrogés sur son véritable rôle dans la résistance, pas vraiment précisé. Quant aux autres personnages, si les femmes - Muguette notamment qui lutte contre sa tuberculose pour ses enfants - ont touché quelques lecteurs, nombreux les ont trouvé plutôt plats et ternes, remplis de « bons sentiments ». Les enfants ont été considérés comme mieux campés et plus émouvants que les adultes.
En conclusion, nous avons évoqué le titre « Par amour » et discuté à propos de ce que l’auteure entendait par là. Amour familial, entre époux, entre parents et enfants et entre sœurs... Muguette guérit de sa tuberculose par amour pour ses enfants, Joffre cache son rôle de résistant par amour pour sa famille, Emélie protège sa sœur, plus faible qu’elle, par amour, et elle fait revenir les enfants de Muguette d’Algérie, ils auraient pu ainsi se noyer à cause de l’amour d’Emélie pour sa sœur...
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