Alice Zeniter est elle NaÏma, la narratrice ? Probablement en partie.
En tous cas, elle nous fait vivre, au travers du vécu de sa famille, des années 50 aux années 75, l’histoire d’une déchirure, celle de son grand père Ali, ancien combattant de la France Libre à Monte Cassino, redevenu agriculteur dans sa Kabylie natale; jusqu’à elle-même, gérant une galerie d’art à Paris, mais cherchant et retrouvant ses racines familiales. En passant par toutes les misères de cette famille, injustement taxée de : famille de « harki», obligée de fuir l’Algérie devant la menace d’ ‘exécution’ par les extrémistes du FLN, méprisée par beaucoup de ‘français moyens‘, et reçue, en métropole, dans des camps de fortune, presque aussi mal que le fuirent les ‘pieds noirs’ pauvres
Sur les 13 membres du Cercle qui ont lu « l’Art de perdre » une quasi unanimité des lecteurs ont aimé cet ouvrage, clair, facile à lire, bien structuré et enrichissant.
Enrichissant car il fait découvrir à beaucoup d’entre nous la vie paysanne et les relations sociales au sein de ces hameaux ruraux de la haute Kabylie. Eclairant, car il met en lumière l’injustice à assimiler à ‘harki’ ceux qui ont combattu au sein de l’Armée Française en Algérie et les anciens combattants des deux Guerres qui acceptaient le versement de leurs modestes pensions.
Instructif, car les conditions d’embarquement et d’ ’hébergement’ en France de ces familles menacées (Rivesaltes, etc…) sont peu connues.
Enrichissant encore car il nous fait découvrir l’existence d’une culture maghrébine à travers les œuvres du vieux peintre Lalla (personnage réel ou licence romanesque ?) et de ses inspirateurs kabyles.
Clair et bien structuré, comme, par exemple, l’acuité des détails factuels qui illustrent la dureté d’accueil au camps de Rivesaltes, c’eut pu être Argelès… qui avait déjà regroupé les Républicains espagnols et des Juifs en 42.
Glaçant comme la brutalité de ce bistrotier provençal qui le traite de « bougnoule’ ou de cet instituteur, à Flers, qui lance que « si Hamid peut le faire, alors…. »
Plusieurs sujets de réflexion nous sont proposés, à traiter, chacun selon son sentiment :
- Entre la patrie, pour laquelle il a risqué sa vie, et cette nouvelle Algérie qu’un FLN lui fait miroiter à la lueur des poignards, pouvait il rester neutre ?
- En abandonnant en Normandie, les objets qu’ils avaient ramenés d’Algérie, Hamid faisait il place à une nouvelle culture ou essayait il perdre sa culture originelle ?
- Naîma prend des risques pour découvrir les racines de sa famille et un beau kabyle blond qui arrivera à rejoindre Paris. Que peut elle en faire (mis à part un livre, bien sûr..) ?
A
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