"La defense Lincoln" de Michaël Connelly spécialiste du
roman noir, a été très bien reçu
par
les
membres
du cercle .Ce roman met en scène un avocat de la défense aux
Etats
Unis.
Vif, roublard et bénéficiant de nombreuses aides dans des milieux
divers, le héros, Michael Hammer, va, tout au long du livre, défendre
un fils de famille, agent immobilier, qui est accusé d’avoir agressé une
prostituée occasionnelle. Partant du principe, hérité de
son père, lui-même avocat à la défense, que « le
pire qu’il puisse lui arriver, c’est de défendre un innocent » Mike
Hammer envisage son rôle comme une compétition avec le procureur,
dans laquelle le meilleur gagne. Aussi ce rôle de défenseur ne lui
pose aucun problème moral. Comme dans une partie d’échecs,
tout ce qui importe, c’est de mettre à terre l’adversaire.
Et le présumé criminel n’est qu’une occasion de livrer
ce duel.
Mais, pour être, avant le procès, dans un rapport de force qui ne
lui soit pas trop défavorable, l’avocat de la défense doit
s’informer, non seulement au sujet de l’état de la juridiction,
mais aussi sur les faits mêmes qui sont reprochés à son client.
D’où des frais considérables de recherche de preuves et de
témoins qui puissent disculper le prévenu ou charger la victime
ou les témoins de celle-ci.
Tout ceci est raconté pas à pas dans le livre : comment le héros
récuse les témoins qui lui semblent trop amoureux de la loi et
de l’ordre. Par contre, avec quel empressement il garde celui qui paraît
confit en religion, espérant que sa désapprobation de la prostitution
en fera un allié.
Comme pour illustrer l’aphorisme de son père, le récit principal
est entrecoupé d’un récit secondaire, concernant un innocent
que notre avocat n’a pas su correctement défendre. Jugé thriller
par certains, analyse du système judiciaire américain pour d'autres, la trame
policière a été jugée peu intéressante.
Les remarques des membres du cercle peuvent se regrouper en plusieurs thèmes
distincts :
Le premier thème porte sur l’organisation du roman, que beaucoup
comparèrent à celui du scénario d’un film : découpage
alterné de scènes intenses et de scènes plus calmes, centrage
sur quelques personnages. D’autres ont pensé que la structure du
roman était très classique, comme dans la Série Noire de
Duhamel. Pour certains d’entre nous, les personnages tels ceux du prévenu
et de sa mère n’étaient pas assez fouillés, et l’intérêt
du roman en a pâti.
Le second thème est celui du système judiciaire des Etats Unis
: la comparaison du système inquisitorial français, où le
juge d’instruction est supposé chercher la vérité des
faits, au système contradictoire nord américain où, en dehors
du plaidé coupable, c’est la lutte entre le procureur et l’avocat
pour emporter l’intime conviction du juré qui dictera le sort de
l’accusé. Les commentaires des membres du cercle allèrent
du rejet indigné du système des Etats Unis à une vision
plus sceptique sur la possibilité, par le système français,
d’approcher tant soit peu son modèle théorique.
Ce second thème introduit le troisième : l’importance de
l’argent dans les chances, pour un accusé, de s’en sortir
devant un juré, sachant que cette caractéristique n’est malheureusement
pas réservée aux seuls Etats Unis et se retrouve en France et ailleurs.
Mais, avec ce facteur, d’autres sont soulignés, comme l’art
de la manipulation par l’avocat de la défense, son expérience,
son intelligence tactique, son sang froid et sens de l’opportunité.
En somme, une petite leçon de savoir être dans une situation de
négociation et beaucoup d’interrogations quant à l’efficacité et
le rôle de la Justice.
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