Un livre dont l’accueil a été mitigé. Certains n’ont pas réussi (et de loin, pour plusieurs...) à lire la totalité du livre. Ils ont vite été rebutés par le style du 19ème, un peu « vieillot », par les phrases parfois très longues, ainsi que par les nombreuses descriptions détaillées, mettant en scène moult personnages, ce qui leur a rendu la lecture complexe, voire fastidieuse.Quelques-uns ont cependant apprécié la beauté de la langue, qualifiée de « balzacienne » par une participante. Un lecteur a apprécié cette forme de récit picaresque, avec le héros qui rencontre une personne qui raconte sa vie, une autre qui narre son aventure, etc.
Ce livre est paru en épisodes journalistiques à l’époque, ce qui peut expliquer les longueurs qu’il faut bien qualifier de « délayage ». Un participant a été gêné par le fait que l’ensemble est tellement détaillé qu’il ne reste aucune place pour l’imagination du lecteur. Parmi les passages qui ont été cités comme trop longs : les nombreuses scènes de guerre, et surtout les épisodes concernant la princesse Ida, que le héros (ou plutôt l’anti-héros) tente d’épouser pour sa richesse. C’est un livre d’aventures dans l’excès, parfois ennuyeux malgré son côté flamboyant.
La méconnaissance de l’histoire de l’Europe de l’époque (Angleterre, Irlande, Prusse notamment) et de cette fameuse guerre de 7 ans (18ème, époque où se déroule le livre)a gêné plusieurs d’entre nous. Mais on voit que les jeunes recrues, souvent enrôlées de force, sont de véritables chairs à canon, ces guerres s’avèrent très cruelles. Le livre se déroule entre 1760 et 1771, une période importante pour la construction de l’Europe. L’Allemagne n’existait pas encore.
Beaucoup ont apprécié la critique de la société « huppée » de l’époque et l’ont trouvée très amusante, un peu à la manière de « Woody Allen » pour une personne, mais dans le genre « humour anglais ». L’auteur se moque allègrement des mœurs de l’époque. Les histoires et les commentaires sont à apprécier au 2ème degré.
La misogynie est omniprésente. Dans le milieu décrit par l’auteur, on s’intéresse aux femmes pour leurs biens matériels et leurs titres, ce sont des objets, presque des « gibiers ». D’ailleurs, Barry gagne pratiquement une femme au jeu (Ida) même si les circonstances font qu’il ne l’épousera pas. Et il « chasse » de la manière la plus grossière milady Lyndon, avec force tromperies et chantage auprès de la dame.
On sent également une forte haine des Anglais, compréhensible après ce que ces derniers ont fait subir aux Irlandais, en prenant leurs terres et en les laissant mourir de faim, notamment.
Et Barry Lyndon ? C’est vraiment l’anti-héros par excellence. Il est antipathique, prétentieux jusqu’au ridicule. Il se congratule sans cesse sur ses mérites, sa belle tournure, sa noble naissance (soi-disant descendant de l’ancien roi irlandais « Boru »). Il est odieux, tricheur, menteur, hâbleur et cynique,il maltraite et fouette son beau-fils de la plus vile manière. Il est décrit comme tel par ses contemporains dans le livre mais il se considère comme parfait et justifie tous ses actes, quels qu’ils soient, par son implacable désir de réussir (mais il finira mal, la morale est sauve !). On le qualifierait aujourd’hui de « pervers narcissique ». Une lectrice dit que finalement, il se moque de lui-même, c’est un ouvrage à lire au 2ème degré en permanence qui permet cette critique sociale forte d’une société pourrie. Un participanttrouve Barrytrès dynamique malgré toutet très imaginatif dans sa recherche de moyens pourgagner de l’argent, par le jeu notamment (Thackeray connaissait bien le sujet, il a pratiquement dilapidé sont héritage dans sa jeunesse en perdant au casino). Un lecteur compare Barry au Cardinal de Retz et à Casanova par l’amour qu’il se porte : « Il partage avec Casanova et le Cardinal la forfanterie et le goût, dans une société de caste, de prétendre appartenir à la même strate que les puissants et justifier ainsi ses intrigues et stratagèmes pour se faire reconnaître, en démontrant avoir plus de mérite qu’eux, puisque le sort familial lui avait légué, par les accidents de l’histoire, une place plus basse que celle à laquelle il prétend avoir droit. »
Quant aux autres personnages, ils ne sont pas très sympathiques non plus, notamment Mme Lyndon.
Une lectrice a préféré « La foire aux vanités », le livre le plus connu de Thackeray, qui a fait l’objet de 7 adaptations cinématographiques.
Et le film de Stanley Kubrick ? Ceux qui l’ont vu l’ont trouvé très beauavec une musique splendide même s’il est dur. Il est vrai que le réalisateur a évité certaines longueurs du livre, qu’il a mis en scène de manière très émouvante le chagrin causé par le décès du fils de Barry. L’histoire est un peu modifiée, le beau-fils y prend une importance plus grande que dans le livre.
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