"Le baiser de la femme araignée" a donné lieu à un film qui a obtenu le prix d’interprétation masculine à Cannes en 1985. Nombre d’entre nous ont reconnu une écriture scénariste qui a facilité cette transposition au cinéma (voir sur internet un entretien avec l’auteur qui retrace son itinéraire)
L’accueil de cet ouvrage a été mitigé par les lecteurs
présents et chaleureusement loué dans les notes envoyées
par deux absentes. La majorité a souligné les difficultés
d’accès à cette histoire qui en contient plusieurs. La
mise en intrigue est lente, peu d’indications sur le lieu ou le temps
dans lesquels elle se déroule. De surcroît, le lecteur doit faire
le lien entre au moins trois fils tirés en parallèle :
-les échanges entre deux hommes qui se trouvent dans une cellule mais
ne savent rien l’un de l’autre et au, début, n’ont
pas envie de se connaître (l’un notamment) ;
- les films que le personnage principal (Molina) va raconter pour faire supporter
le temps, récits qui vont de légendes (comme la femme panthère
ou les zombis) à des récits plus politiques comme celui de la
séduction de cette femme qui trahit la résistance et se laisse
séduire par un bel officier nazi, un monde imaginaire qui permet aux
deux hommes de se parler et de parler d’eux par des commentaires sur
les aventures des personnages évoqué ;
- et puis les réflexions sur l’homosexualité qui ont agacé beaucoup,
notamment les hommes (les nôtres).
De fait, le clivage d’appréciations faites sur ce roman s’est
fait tendanciellement : entre les hommes qui ont été plutôt
critiques, voire très critiques puisqu’ils n’en ont pas
achevé la lecture et les femmes qui (plus appliquées ?) ont fait
l’effort de dépasser les difficultés de construction de
ce livre.
La question de l’homosexualité est celle qui a été la
plus discutée. En replaçant ce roman dans le contexte où il
a été écrit, l’après-68, on voit qu’il
réunit deux hommes incarnant des slogans « révolutionnaires » de
l’époque : « changer le monde » par une révolution
recourant à la violence y compris armée et « changer la
vie », libérer les mœurs, entre autres la sexualité.
De ce point de vue, la mise en scène d’une cellule de prison réunissant
deux personnes se rattachant à ces deux courants, dont les relations
vont de la méfiance, à la curiosité, l’étonnement
puis à la compréhension mutuelle et, enfin, à la tendresse,
est très originale.
Si certains ont considéré que le dénouement était « annoncé » dès le début, d’autres ne l’avaient pas compris. Tout le roman se déroule dans une certaine ambivalence : des gestes, quelques mots échangés, mais pas d’introspection, ni intervention du narrateur pour dire l’évolution des relations entre ces deux personnages.
Le titre énigmatique qui est censé désigner Molina, la femme qui tisse patiemment sa toile qui réunit (ou enferme) son environnement, peut aussi être interprété comme l’expression de la dictature qui enserre et enferme tout ce qui s’oppose à elle.
En définitive, selon Puig lui-même, Molina représente l’archétype de la femme soumise. La femme dominée qui trouve sa force d’être par ce qu’elle apporte à ses proches : les soins, la tendresse, l’empathie, tout ce qui touche la vie quotidienne et la vie tout court.
L’accord s’est fait, en fin de réunion (où l’on
a beaucoup ri de nous-mêmes), sur l’intérêt à voir
le film qui se trouve sûrement en DVD (sous le même titre).