« Je m'en vais ». Ainsi s'exprime le personnage principal au début du livre. Ferrer, quitte sa femme, tient une galerie de peinture à la dérive, se fait rejeter par ses amantes, entreprend un voyage au pays des Inuit à la recherche d'un trésor qu'il se fait prendre, se perd entre Biarritz et San Sebastian, et survit à un accident cardiaque.
Question de prisme : "Je m'en vais" prix Goncourt 99 n'a pas fait que des ravis. Les arguments qui ont servi aux uns pour l'encenser ont servi aux autres pour le démolir. " Vide, creux, froid, aucun aspect intimiste, les atermoiements d'un cinquantenaire en crise ne nous intéressent pas " dirent les uns, " Ah, quel brio, comment en peu de mots peut-on créer des tas de situations, des équipées du Cercle polaire au XVIème arrondissement, le tout sous fond policier " dirent les autres.
Question de prisme toujours, il y a eu ceux qui cherchant à établir un lien avec l'auteur n'y ont vu aucun intérêt, vu que l'auteur ne se livre point et il y a eu ceux qui se sont laissé porter par l'imprévu, la virevolte entre imaginaire et réel, les situations invraisemblables, le côté 'masculin', le détachement de l'auteur par rapport à l'histoire, le parallèle entre le 'Je m'en vais ' et le temps qui passe.
" Les causes perdues " est un livre à classer dans les livres- témoignages. Là, le sujet est bien réel et traite des causes humanitaires. L'auteur est lui aussi bien réel, puisqu'il exerce son activité d'écrivain en marge de son activité de médecin d'une célèbre ONG. L'action se passe, il y a une quinzaine d'années, en Ethiopie au plus fort du conflit érythréen.
Le narrateur est un vieil arménien ancien marchand d'armes, qui passe ses jours à s'ennuyer dans la ville assiégée avant l'arrivée d'un groupe " d'idéalistes " engagés dans le combat contre la famine et la déportation de familles entières. "Les causes perdues " auraient mérité une analyse plus poussée du contenu ! Nous sommes restés au stade du débat "Pour ou contre les actions humanitaires ? '' Certes, l'auteur nous décrit des personnages paumés, en fuite, semble amer, désabusé ou a tout simplement envie de rendre compte de la réalité, de remettre les choses en place et d'ôter toute illusion à ceux qui s'en font sur les motivations profondes de ceux qui s'engagent au côté des plus démunis et qui vont tenter de fuir ou régler leurs problèmes en tentant de régler ceux des autres.
Ce livre peut apparaître courageux ou suicidaire, c'est selon, il rétablit une sorte de " vérité " sur la réalité des actions humanitaires mais il décrit aussi un pays où la beauté des femmes est à couper le souffle et où règne un envoûtement qui tel une toile d'araignée paralyse toute tentative d'échappement. A ce propos, le livre a reçu un accueil très discuté par une équipe de chercheurs ayant travaillé sur les ensablés (anciens exilés italiens issus du fascisme) et qui a estimé que l'auteur avait pillé et plagié. A lire la réponse de l'auteur dans " Lire ".
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