Sophie en rêvait, le CERCLE l’ a fait . Sophie rêvait de
l’Elu, le CERCLE l’a lu.
Coup de cœur pour l’un d’entre nous, pour sa profondeur historique,
la construction des personnages. Pour les autres, niveau de satisfaction variable
et scepticisme, laissant parfois un trouble, de multiples interrogations. Un
glossaire eut été utile., quand on est étranger à un
monde, pas toujours évident d’y entrer.
Quel est le thème ? : New York dans les années 40, où cohabitent
dans un quartier de Brooklyn, tout en s’ignorant deux communautés
juives issues de l ‘émigration d’Europe de l’est (
Russie, Pologne) , L’une d’entre elles particulièrement
hermétique à l’évolution de la société est
composée des Hassidim, l’autre plus tolérante sera à la
base du sionisme. Le roman commence par une partie de base ball composée
d’adolescents des 2 communautés qui s’impliquent dans le
match avec une telle sauvagerie que l’un des héros du roman, Reuven
manque de perdre un œil à la suite d’un coup particulièrement
violent de l’autre héros Danny : l’Elu. A la suite de cet
accident, les deux adolescents deviennent amis et l’auteur s’est
appuyé sur cette amitié liée à leur solitude de
deux enfants exceptionnellement surdoués, (ce qui peut expliquer leur
solitude) assidus et disciplinés dans l’apprentissage pour mettre
en scène les milieux dont il sont issus, peu de personnages féminins,
les pères sont rabbins, élèvent leurs enfants et règnent
dans leur univers respectif.
Le contraste est saisissant entre l’ouverture d’esprit du père
de Reuven , veuf, attentif et toujours à l’écoute de son
fils et le silence qui règne entre Danny et son père qui a fait
de l’introspection dans le silence une méthode d’éducation
. Le père de Danny se sert de Reuven pour communiquer avec son fils.
Grâce à l’attitude du père de Reuven et la curiosité du
fils qui ne cesse d’interroger son père, le lecteur découvre
les communautés juives et l’origine des Hassidim, suit les migrations
du peuple juif et la naissance du sionisme.
Le commentaire sur le Talmud donne droit à des joutes oratoires entre
apprenti et maître, et participe à la formation de l’esprit.
Le pilpoul assimilé par l’un d’entre nous à du « parler
pour ne rien dire » a parfois agacé et paru un peu long, une des
préoccupations étant d’introduire des affirmations erronées
que l’élève doit identifier.
Pour la plupart d’entre nous, le suspens règne tout au long du
livre et tient le lecteur en haleine. Les destins se croisent . Reuven, le
perpétuel anxieux qui avait émis l’idée de devenir
rabbin concrétise ce souhait renforcé par son expérience
avec les Hassidim. Quant à Danny, qui a découvert secrètement
Freud, évolue lentement avec le soutien passif de son père vers
la profession de psychanalyste, ce père qui apparaissait aux yeux de
tous comme un abominable géniteur, détestable, et tyrannique.
Le livre se termine sur un sentiment de tolérance et un formidable hymne à la
vie
L’auteur Chaïm Potok fait partie des écrivains juifs new
yorkais dans la mouvance des Singer, Bellow, Roth et dont la plupart des oeuvres
retrace le milieu juif new yorkais des émigrés (il est d’origine
polonaise) et les destins contrariés ; chez Potok, les personnages restent
ancrés et enracinés dans leur communautés et ne choisissent
une voie différente qu’au prix de lourdes luttes internes. Potok
a connu ces tourments dans sa jeunesse : alors l’Elu, une sorte de vengeance
?
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