12 nuances de noir-blanc..
Ce compte-rendu c’est comme colorier un triangle entre trois pointes : chef d’œuvre, nul , pas lu. A part cela, plein de nuances.
Maryse en introduction revient sur le choix de « Harlem Quartet » de James Baldwin . Le tour de table a montré que le livre a été difficile à lire, surtout au début et, qu’il ait été aimé, beaucoup, moyennement ou peu, n’a pas laissé indifférent. Gros livre, foisonnant, imprévu, beaucoup ont signalé l’inégalité des passages, certains passionnants (la tournée dans le Sud, le voyage à Paris), d’autres répétitifs et ennuyeux. Pour certain-e-s, Baldwin est une totale découverte ainsi que son univers et ont ressenti ce qu’était la vie d’un jeune homosexuel, pauvre dans le ghetto, qui se réalise dans la musique. Pourtant certaines situations se retrouvent ailleurs : violences familiales mais aussi amour fraternel et solidarité. Le style a été parfois apprécié pour sa musicalité, voire de la poésie, ou au contraire peu apprécié parce que « partant dans tous les sens ». La qualité de la traduction pose problème. Un accord général : les paroles en français de chants de gospel ne donnent rien. Il y a de la déception à attendre de savoir comment Arthur est mort, annoncée dès le début, et à la fin, on ne comprend pas bien pourquoi dans le sous sol d’un pub londonien. Le personnage de Julia, a intrigué et plu pour beaucoup ainsi que les parents Paul et Florence. Le fait que ce soit Hal, le grand frère, qui narre ses souvenirs offre l’intérêt d’une certaine distance, mais aussi le défaut d’installer une grille de lecture qui peut se contester.
Beaucoup ont conseillé d’aller voir les films green book, et I am not your negro, de lire la bio de Baldwin qui donne beaucoup de clés.
Marie Darrieusecq vient de re-traduire (semble-t-il très bien) « chroniques d’un enfant du pays » de James Baldwin, Gallimard article paru dans bibliobs le 30 avril 2019.
Finalement on ne regrette pas ce choix.
Harlem quartet Intro Maryse
Pourquoi et comment je l’ai choisi
Après le film I am not your negro j’ai voulu lire du Baldwin et un ami m’a conseillé Harlem quartet, une de ses ouvres majeures.
Quand je l’ai proposé je ne l’avais pas fini et je vous ai proposé de renoncer, vu le nombre de pages et son contenu particulier ; mais on a décidé de le garder, changer après un vote c’est aussi créer un précédent. Enfin c’est un grand écrivain américain, iconoclaste pour son époque, mais considéré comme majeur.
Entre temps je me suis penchée sur la vie de Baldwin notamment son enfance, et la lecture sur écran de la préface de Mabanckou car je connaissais sa vie et ses engagements d’adulte auprès du mouvement des droits civiques, sa vie en France pour fuir l’Amérique qui brise ses minorités.
Pierre qui n’a pas aimé ce livre m’a dit que je l’ai choisi par obsession du racisme, à titre professionnel, militant et privé.
Mais contrairement à ce beaucoup croient, ce livre n’est pas d’abord centré sur les relations avec les américains blancs, même si c’est la toile de fond. C’est un livre d’amour, familial, fraternel dans une communauté qui vit en ghetto.
Le Harlem des années 50 est l’image même du ghetto.(terme qui vient de l’Europe centrale pour désigner les ghettos juifs). Les relations y sont intenses, parfois violentes et le lien avec le monde extérieur très ténu et difficile. Le ghetto c’est le summum de la ségrégation urbaine, sociale et ethnique. L’apport du livre est d’être une voix du ghetto, de cette époque, avec le poids des églises, la guerre de Corée, la pauvreté, l’exclusion, le racisme ouvert.
Le livre est parfois cru puisqu’il met en scène l’homosexualité (ce qui était le cas de Baldwin) mais l’érotisme n’est jamais pornographique, il y a toujours de l’amour, comme partout, dirait-on. Ce qui le rend difficile parfois, c’est que les protagonistes (Arthur, Jimmy, Julia) s’expriment peu par eux mêmes mais par la voix de Hal à travers ses souvenirs, ses impressions, ses jugements. Mais si on persévère, on se laisse prendre par cette histoire, malgré la distance historique et culturelle. On regrette de ne pas le lire avec un cd de gospel dans les oreilles.
<<< Séance précédente : «Une histoire birmane»
Séance suivante >>> : «Un fils en or»