L’accueil du livre est très contrasté. Il y a ceux qui ont eu trop de difficultés à le lire, ceux qui l’ont aimé malgré des longueurs .Pour la majorité, c’est la première partie qui a posé le plus de problèmes de repères, en termes de distance culturelle, de profusion des personnages. La « sorcellerie » est-elle vraie ? Esther n’est-elle pas simplement épileptique, ou douée d’intuitions autant positives que négatives ? D’autres ayant vu l’ensemble du livre comme un conte « des mille et une nuits ? » ne se sont pas posé la question.
La deuxième partie donnant plus d’éléments sur l’histoire de l’Egypte a été plus facile d’accès et jugée plus instructive. En mettant en scène un trio de jeunes juifs de différentes origines sociales qui auront un destin contrasté, il décrit la montée du nationalisme égyptien contre l’occupation anglaise dans ses composantes religieuses politiques et économiques. (Islamisme, sionisme, ..).
La description du roi Farouk, faible et dépravé, louvoyant entre les occupants anglais et la possible victoire de l’Allemagne apparaît, malgré la caricature, finalement crédible.
L’histoire d’amour interdite en Entre Zohar juif (le narrateur) et Masreya musulmane, sa sœur de lait (La sensualité en a été jugée très belle) représente pour certains le mythe de l’entente entre communautés. Le mythe du paradis perdu qu’a représenté l’Egypte cosmopolite de la première moitié du XXème siècle et que Tobie Nathan tente de restituer. Elle permet de garder le fil de l’intrigue qui se perd parfois.
Le livre est très touffu et son style ou se mêlent poésie, proverbes, et humour voire crudité a, soit plu, soit dérouté,
Seule Maryse avait vraiment les clés de la compréhension (même origine et génération, même parcours familial que Tobie Nathan, même nostalgie de la perte de cette mémoire familiale). Ainsi, elle voit que Jinane, la mère de Masreya est inspirée d’Oum Kalthoum, etc..
L’ethnopsychiatre ne fait pas ici de psychologie mais déploie sa culture en anthropologue, connaisseur des rites, des superstitions souvent semblables, en tous cas croisées des juifs et des musulmans en terre arabe.
Le Pays qui te ressemble, devrait s’intituler le pays qui me ressemble. (à l’auteur). A plusieurs reprises Tobie Nathan, par la voix de Zohar revendique l’ancienneté de la présence juive en Egypte, cette absence est une perte pour le pays. Lui reste égyptien en exil, ce pays ne le quitte jamais.
La discussion a été très riche, chacun donnant des clés de lecture aux autres. (Place des coptes et autres communautés, laïcité chez les officiers libres, place ancienne des frères musulmans, donc intérêt pour la compréhension des printemps arabes et leur échec, etc). Après la réunion, ceux qui n’avaient pas tout à fait fini, vont lire les dernières pages.
Pour en savoir plus, on trouve des interviews de Tobie Nathan sur internet, y compris la recette de la salade de fèves qui a accompagné la soirée.
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