Jim Fergus : Mille Femmes Blanches, les carnets de May Dodd. Première édition St Martins Griffin 1997, traduction : Paris, Cherche-Midi 2000, 387 pages.
Intrigue : un chef Cheyenne, Little Wolf, voulant préserver sa tribu et l’adapter à l’envahissante société occidentale, propose, en 1875, au président des Etats Unis, le général Grant, qui vient d’être le vainqueur de la guerre de Sécession, d’échanger mille femmes blanches contre mille chevaux. Après quelques remous au Congrès, l’échange est accepté et des services sociaux se mettent en route pour recruter ces femmes qui partent comme volontaires pour des raisons multiples. Cependant le récit est celui d’une d’entre elles, May Dodd. Celle-ci montre dès le début du roman un fort caractère, une vision libérée de la sexualité et beaucoup d’intelligence et d’astuce dans ses relations à autrui et dans l’analyse des situations quotidiennes.
Une dizaine d’autres femmes l’accompagnent, blanches à l’exception d’une ancienne esclave de peau noire, mais que les indiens considèrent comme blanche.
Le récit est celui de leur adaptation, plus ou moins facile, au mode de vie nomade des Cheyennes, et à leur culture singulière. Un récit d’adaptation construit grâce à des scènes mettant May Dodd comme protagoniste principale mais aussi chacune de ses compagnes. Celles-ci semblent sortir d’un échantillon tiré au hasard avec une sudiste snob et coincée, une grenouille de bénitier, des jumelles irlandaises anciennes délinquantes, une Suisse-Allemande force de la nature, etc.
Nous voyons aussi que ces indiens sont déjà en contact depuis longtemps avec la civilisation européenne, ne serait-ce par leurs contacts avec les forts des militaires et les marchands qui leur échangent des peaux de bison contre des marchandises, dont l’alcool. Alcool qui les met dans un état sans limites.
Comme il faut bien finir un livre avec une touche de réalisme, l’auteur voue dans les deux derniers chapitres, toutes ces femmes ou presque à la mort par massacre.
La personne de May Dodd est d’autant plus intéressante que, choisie par le chef Little Wolf pour être sa femme, elle n’en reste pas moins éprise du capitaine John G. Bourke, le commandnt du Fort Laramie, dont elle aura un enfant. Un autre personnage intéressant est celui Gertie, l’éclaireuse indienne de Fort Laramie, trait d’union entre les deux cultures.
Enfin il faut dire que l’auteur est suffisamment malin pour que des lecteurs aient pris ce qu’il raconte, un mythe, pour une réalité probable.
La discussion :
Dans un bel ensemble les lecteurs se sont félicités du choix du livre, d’ailleurs recommandé depuis un certain temps par la mère du cercle, Juliette Helson. Ils l’ont trouvé intéressant par le fond, très lisible par la forme(le journal intime), bien documenté , avec une intrigue qui ne relâche pas l’attention du lecteur, et des notations multiples sur le mode de vie et de penser des Chevennes.
Cependant certains des lecteurs ont jugé la panoplie des femmes un peu trop systématique et donnant lieu à des figures stéréotypées, même si cela permet de saisir par des angles différents les approches des mœurs indiennes par les « blanches ». Cet avis n’a pas été partagé par tous, certains estimant que le caractère stéréotypé permet de mieux saisir la transformation des personnages.
Une discussion s’est ouverte autour de la cruauté des blancs, leur cynisme en signant des traités de paix systématiquement violés par eux, et celle des indiens, capables d’atrocités contre ceux d’une autre tribu. Faut-il utiliser la théorie des deux démons, toujours avancée par les vainqueurs, ou s’en méfier ?
Certains ont loué la sagacité de Little Wolf dans son essai lamarckien de créer, par la naissance d’enfants métis, des ponts entre les deux cultures, mais il n’y a pas eu unanimité chez les lecteurs.
Ce sera la séance où chacun présente les livres qu’il voudrait proposer au cercle. Il est hautement recommandé de présenter trois livres ou moins, faute de quoi l’on se noie dans les titres et les commentaires et le résultat est que souvent aucun de ces livres n’est ensuite lu par le cercle.
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