Redécouverte de George Sand plus connue par de rebutantes dictées extraites de la Petite Fadette ou La mare au diable que par le reste de son œuvre qui fut pourtant fort dense. Certains d’entre nous ont manifesté plus d’intérêt pour le personnage que pour son œuvre prolifique. Traversant le siècle à la manière de Victor Hugo qui sur sa tombe a prononcé ces mots : « Je pleure une amie et salue une immortelle », George Sand fut pionnière sur plusieurs plans.
Son œuvre est indissociable de son personnage qui lui-même fut fortement marqué par la période de l’Histoire de France : une France dont un écrivain célèbre avait dit « La France s'ennuie », alors que se fomentait au contraire une fermentation des idées, prélude aux révolutions à venir, par des esprits mécontents d’un présent qui ne donnait pas assez d'émotions. George Sand vécut pleinement ce siècle et le marqua durablement : elle déclencha polémique ou admiration. Sa double appartenance : aristocratique par son père, populaire par sa mère expliquent ses choix, ses ambiguïtés, ses luttes, ses comportements. Ce seront d’abord les préoccupations personnelles, morales qui dominent ses œuvres, puis les préoccupations sociales, politiques et ses thèmes majeurs tournent autour de l’amour, sa passion de l’Humanité et l’amour de la nature.
Femme
hors du commun, muse de poètes et de musiciens, engagée politique, à l’origine
de « La cause du peuple » et ardente défenseur des droits
de la femme, on ne compte plus les sites, les articles, les biographies sur
sa vie hors du commun pour l’époque. Elle y est décrite
frondeuse, ambiguë, prodigue, enflammée, mère indigne pour
sa fille mais aussi mère courage, mère poule pour son fils, grand-mère
gâteau, éternelle amoureuse, parfois déçue, naïve
en amour, ravageuse, insatiable et insomniaque. « La dame de Nohant » écrivait
toutes les nuits, elle fut une des premières femmes de lettres ayant
vécu de sa plume : « son gagne-pain » disait-elle qui fut
le prix à payer de sa vie de femme libre.
Citons ses propos sur la conception de ses romans et sur sa capacité à produire.
« Je reconnus que j'écrivais vite, facilement, longtemps, sans fatigue; que mes idées, engourdies dans mon cerveau, s'éveillaient et s'enchaînaient, par la déduction, au courant de la plume; que dans ma vie de recueillement j'avais beaucoup observé et assez bien compris les caractères que le hasard avait fait passer devant moi, et que, par conséquent, je connaissais assez la nature humaine pour la dépeindre »
« Je n'avais pas la moindre théorie quand je commençai à écrire, et je ne crois pas en avoir jamais eu quand une envie de roman m'a mis la plume en main. Cela n'empêche pas que mes instincts ne m'aient fait, à mon insu, la théorie que je vais établir, que j'ai généralement suivie sans m'en rendre compte, et qui, à l'heure où j'écris, est encore en discussion. Selon cette théorie, le roman serait une oeuvre de poésie autant que d'analyse. Il y faudrait des situations vraies et des caractères vrais, réels même, se groupant autour d'un type destiné à résumer le sentiment ou l'idée principale du livre. Ce type représente généralement la passion de l'amour, puisque presque tous les romans sont des histoires d'amour »
Beaucoup d’entre nous ont commencé par une biographie pour découvrir
le personnage avant de plonger dans une de ses œuvres.
Celle de Jean Chalon donne le ton « Chère George Sand » et
la présente sous un jour plutôt sympathique.
Ci-après une brève description des livres de George Sand que lus par les membres du CERCLE ainsi que des photos de Nohant, lieu sublime où plane la présence de la « dame de Nohant ».
Livres de George Sand lus par les membres du CERCLE
Dans la lignée des romans inspirés du monde paysan, « La mare au diable » occupe une place de choix. L’auteur s’épanche sur une histoire d’amour qui a pour toile de fond son cher Berry. Face à une société pervertie par les valeurs montantes que sont l’argent et le profit, l’auteur exalte les valeurs simples et nobles du milieu paysan. Climat un peu ensorcelleur , non sans rappeler les années 70 du nord de la France à un de nos lecteurs.
Bernard de Mauprat a perdu ses parents très jeune, il est arraché à son oncle qui souhaitait l’élever comme son fils, par son grand père, être totalement perverti et brutal qui vit sauvagement dans un château entouré de fils alcooliques et dégénérés terrorisant leur entourage et les fermiers avoisinants. Un jour, une jeune fille s’égare non loin et est tenue prisonnière dans le château. Les oncles somment Bernard de violer la jeune fille qui n’est autre que sa cousine Edmée de Mauprat. Ils réussissent à se sauver des griffes des affreux grâce à un incendie qui ravage le château et élimine la plupart de ses occupants. Bernard passera le restant de ses jours à séduire puis épouser la seule femme qu’il aimât : sa cousine qui ne succombera qu’à l’issue d’une longue transformation du jeune homme, qui de sauvage est devenu un être raffiné et cultivé mais après d’éprouvantes épreuves: beaucoup de thèse rousseauistes dans ce roman traitant d’un amour entier et unique perçu différemment par nos lecteurs « Flaubert c’est autre chose »
« Laura, voyage dans le cristal » conte allégorique, étonnant
, à la manière d’une nouvelle futuriste, Le narrateur,
Alexis, jeune homme doué d’imagination est entré dans la
boutique de M. Hartz, marchand naturaliste. Au cours de sa visite, il casse
une géode et découvre les merveilles. Il tombe amoureux de sa
cousine Laura qui semble indifférente. Après avoir contemplé une
géode de quartz améthyste, commence un premier voyage dans le
cristal, qui mène les deux jeunes gens dans un monde merveilleux.
«
Le compagnon du tour de France » , écrit après avoir
connu Pierre Leroux, ce livre évoque dans une 1ère partie l’histoire
du compagnonnage et prélude à « Liberté, Egalité,
Fraternité » mais aussi les thèmes chers à George
Sand sur les amours impossibles entre gens de milieux différents .Pierre
Huguenin et son père sont compagnons. Le père après
un accident doit laisser sa place au Corinthien ami de son fils. Tous deux
s’éprennent de femmes de la noblesse mais cet amour se révèle
sans issue. Roman proustien selon notre lectrice.
Mont revêche. Comparable à « Vipère au poing », George Sand y décrit une ambiance familiale faite de conflits, d’intrigues, de jalousies comme si elle avait voulu y régler ses comptes avec sa fille Solange qui avait 30 ans au moment où sa mère écrivit ce roman bien enlevé, d’une grande finesse psychologique.
Indiana le plus décrié, abandonné par l’un d’entre nous, un des premiers romans de George Sand qui nous emmène à l’Ile Bourbon et conte les amours malheureux d’Indiana, jeune femme créole mariée à un vieil officier brutal et qui se laisse séduire par un aventurier. L’aspect romanesque a quelque peu vieilli, œuvre de jeunesse ?
Promenade dans le Berry Pas forcément facile à lire avec son vocabulaire berrichon . L’auteur fait raconter des légendes, des histoires locales, non sans rappeler les contes pour enfants ou légendes d’autres régions destinées à provoquer les peurs et frissons.
Qui ne souvient pas de « la petite Fadette » où l'amour sert une fois de plus de fil conducteur. D'abord celui entre deux frères jumeaux contraints de se séparer, puis l'amour passion avec l'arrivée de la jeune Fadette qui bouleverse l'existence des deux frères. George Sand s’est largement inspirée de légendes de son Berry pour imager son roman qui reste une de ses œuvres majeures. Une sorte de conte de fées, commençant tristement avec une issue heureuse.
Pour suivre la lignée des romans champêtres, « François le Champi », est à nos yeux le pur roman d’amour pour ne pas dire le roman d’un amour pur et absolu. Il n’y est question que d’amour entre une femme encore jeune, femme trahie par son mari meunier et le héros que l’on découvre à son enfance, orphelin. Ici tout n’est que sensibilité d’êtres simples et lumineux dans un monde de la campagne.
« Jeanne » lu par notre membre du CERCLE prénommée Jeanne (le hasard, nous a t-elle dit !!!) narre l’histoire d’une jeune femme au cœur simple, engagée comme servante dans une village de la Creuse. Elle est désirée par plusieurs hommes mais se refuse au mariage avec l’un d’eux au prétexte d’un vœu qu’elle fit dans le temps. Histoire qui se termine tragiquement par la mort de l’héroïne. Ce roman a précédé La petite Fadette, François le Champi, La mare au diable.
Dans la série des carnets de voyage, « Un hiver à Majorque » fait figure de précurseur. George Sand y décrit le séjour qu’elle effectua dans l’île en compagnie de Chopin et de ses jeunes enfants. Guère tendre avec la société majorquine qu’elle dépeint comme incultes ressemblant plus aux africains qu’aux européens, elle y fit une expérience à la fois douloureuse (une vague sensation d’exil) et enrichissante sur la recherche de son moi profond, préfigurant sa grande œuvre « L’histoire de ma vie ». Chopin n’est pas cité, seulement évoqué sous les traits d’un éternel malade., ce qui rend l’ouvrage très différent du « Voyage à Venise » relatant le voyage qu’elle fit avec De Musset.
La conclusion de nous tous est qu’après avoir lu tous ces romans sur l’amour, nous nous trouvons beaucoup plus rétrécis dans l’expression de nos sentiments.
La visite de Nohant :
En arrivant à Nohant, nous avons tous été saisis par la
magie ambiante des lieux, comme si le temps s'était arrêté.
L'intérieur de la maison a conservé le décor que la romancière
connut jusqu'à sa mort : cuisine, salle à manger, chambre bleue,
petit théâtre et théâtre de marionnettes.
Nous avons eu la chance de visiter la maison et le parc un jour de Patrimoine
artistique avec un guide hors pair et nous étions pratiquement seuls à déambuler
dans le parc et son petit bois romantique, le jardin avec .sa roseraie, le
cimetière où elle repose ainsi que ses descendants.
Pour en savoir plus sur George Sand un site incontournable :
http://agora.qc.ca/mot.nsf/Dossiers/George_Sand
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